PASCAL
14/08/2007, 10h05
« Il était une fois un homme rusé qui aimait se promener, à l’affût des bonnes affaires. Un jour, il aperçut avec surprise le Diable en personne, pâle, maigre, les yeux chassieux et larmoyants, mal peigné, en haillons, et dont même la queue était galeuse et en piteux état. Ce diable grelottait à la porte d’un café-restaurant dont il humait les odeurs alléchantes, visiblement affamé. L’homme rusé flaira une bonne affaire et invita le Diable à déjeuner. A la fin d’un repas bien arrosé par de bons vins, buvant du café avec de l’Armagnac, il demanda au Diable pourquoi il se trouvait dans une telle mauvaise condition. « Dans les bons vieux temps » – répondit le Diable – « quand les hommes mouraient, ils avaient de bonnes âmes bien grasses, et beaucoup d’elles tombaient dans nos mains. Rôties, elles avaient un goût délicieux et nous brûlions ce qui en restait pour faire un excellent charbon qui chauffait l’Enfer et ses fourneaux à merveille. Mais à présent, les hommes ne savent plus comment développer leur âme et quand ils meurent, ils n’ont que des personnalités que la Lune saisit et consomme immédiatement. Les feux de l’Enfer se sont ainsi éteints et nous souffrons tous du froid et de la faim. C’est à peine si on arrive à survivre. » L’homme rusé demanda alors au Diable s’il savait comment les hommes pourraient de nouveau se fabriquer des âmes bien grasses. La réponse étant affirmative, il proposa au Diable : « Enseigne-moi ce qu’il faut faire pour développer une belle âme, et nous conviendrons d’un mot de passe qui te permettra de reconnaître les âmes ainsi fabriquées. Et tu t’arranges avec saint Pierre pour qu’il te cède ces âmes. » Le Diable expliqua donc à l’homme rusé qu’il faut d’abord que chaque homme se connaisse bien par une observation impartiale et sans analyse ou introspection de son comportement journalier, avec la conscience de la sensation présente dans son corps et surtout avec le rappel-de-soi. Il révéla aussi les lois de l’Univers qu’il faut bien connaître et comprendre pour que les exercices d’observation avec la sensation du corps et le rappel-de-soi soient 100 % efficaces, ainsi que les cinq étapes obligatoires par lesquelles chaque homme doit passer pour que son âme soit développer dans toute son ampleur possible, à savoir :
- 1. Avoir tout ce qui est réellement indispensable et satisfaisant pour la bonne santé et le plein fonctionnement du corps planétaire.
- 2. Eprouver le besoin constant et instinctif de perfectionnement intérieur par tous les moyens pour devenir, en évitant l’identification avec les circonstances extérieures de la vie quotidienne et l’expression de ses émotions passionnelles et sentimentales, un Etre libre de son propre monde.
- 3. S’efforcer sans cesse et consciemment de connaître toujours plus à fond les lois de la création du monde et du maintien de son existence.
- 4. Payer le plus vite possible, par son comportement volontairement conscient, pour son individualité indépendante, constante et indestructible.
- 5. Et finalement, toujours aider non seulement ses semblables, mais aussi tous les êtres des autres formes, à perfectionner de la manière la plus rapide et sûre leur Raison jusqu’au degré de l’auto-individualité.
Ayant appris ce qu’il fallait faire, l’homme rusé organisa des groupes de Travail pour enseigner ce système de développement harmonieux de l’homme, dont la pratique conduit à l’acquisition d’une âme. Beaucoup de ses élèves firent des efforts sérieux et réussirent dans cette entreprise pas du tout facile ou mécanique. Et quand ils moururent et se présentèrent aux portes du Paradis, voici le Diable qui se tenait à côté de saint Pierre auquel il demandait de poser aux âmes la question : « As-tu pratiqué le rappel-de-soi ? ». Recevant la fière réponse : Oui ! et aussi la sensation du corps, et la non-identification… » le Diable immédiatement revendiquait cette âme, la saisissait et l’emportait en Enfer à la grande réjouissance de tous les autres diables. On ne sait comment, une de ces âmes réussit un jour à faire parvenir un message aux membres des groupes de l’homme rusé, leur racontant cet événement malheureux. Très inquiets, ses élèves se précipitèrent chez l’homme rusé, lui demandant pourquoi il leur donnait des exercices qui les précipitaient en Enfer à leur mort inévitable. « Mais ce n’est pas du tout le cas ! » – répondit l’homme rusé – « je vous ai donné les moyens de développer votre âme et vous ai toujours dit qu’il ne faut jamais parler de vos exercices en dehors des membres de nos groupes. » « Mais » – dirent les élèves – « c’est saint Pierre qui pose la question. Il faut bien lui répondre ! ». « Et alors » – fit l’homme rusé – « avez vous vu saint Pierre ou le Diable dans votre groupe ? Tout ce que vous avez à faire c’est de ne pas révéler aux personnes hors des groupes ce que vous avez appris de moi. N’avez-vous pas compris que je me suis arrangé du Diable comment faire une âme, mais j’ai aussi arrangé de le tromper en fin de compte en vous enseignant qu’il vous faut SAVOIR ce qu’il faut faire, puis OSER le faire et VOULOIR suivre mes pas et alors SE TAIRE. » Ayant compris, les disciples sont eux-mêmes devenus des hommes rusés et trompaient le Diable. Tout finit bien et dorénavant toutes les âmes gardèrent le silence et entrèrent au Paradis. »
Conte allégorique expliquant « La voie de l’homme rusé »
adapté d’après « Du Tout et de Tout » de G. I. GURDJIEFF
et « The Fourth Way » de P. D. OUSPENSKY.
- 1. Avoir tout ce qui est réellement indispensable et satisfaisant pour la bonne santé et le plein fonctionnement du corps planétaire.
- 2. Eprouver le besoin constant et instinctif de perfectionnement intérieur par tous les moyens pour devenir, en évitant l’identification avec les circonstances extérieures de la vie quotidienne et l’expression de ses émotions passionnelles et sentimentales, un Etre libre de son propre monde.
- 3. S’efforcer sans cesse et consciemment de connaître toujours plus à fond les lois de la création du monde et du maintien de son existence.
- 4. Payer le plus vite possible, par son comportement volontairement conscient, pour son individualité indépendante, constante et indestructible.
- 5. Et finalement, toujours aider non seulement ses semblables, mais aussi tous les êtres des autres formes, à perfectionner de la manière la plus rapide et sûre leur Raison jusqu’au degré de l’auto-individualité.
Ayant appris ce qu’il fallait faire, l’homme rusé organisa des groupes de Travail pour enseigner ce système de développement harmonieux de l’homme, dont la pratique conduit à l’acquisition d’une âme. Beaucoup de ses élèves firent des efforts sérieux et réussirent dans cette entreprise pas du tout facile ou mécanique. Et quand ils moururent et se présentèrent aux portes du Paradis, voici le Diable qui se tenait à côté de saint Pierre auquel il demandait de poser aux âmes la question : « As-tu pratiqué le rappel-de-soi ? ». Recevant la fière réponse : Oui ! et aussi la sensation du corps, et la non-identification… » le Diable immédiatement revendiquait cette âme, la saisissait et l’emportait en Enfer à la grande réjouissance de tous les autres diables. On ne sait comment, une de ces âmes réussit un jour à faire parvenir un message aux membres des groupes de l’homme rusé, leur racontant cet événement malheureux. Très inquiets, ses élèves se précipitèrent chez l’homme rusé, lui demandant pourquoi il leur donnait des exercices qui les précipitaient en Enfer à leur mort inévitable. « Mais ce n’est pas du tout le cas ! » – répondit l’homme rusé – « je vous ai donné les moyens de développer votre âme et vous ai toujours dit qu’il ne faut jamais parler de vos exercices en dehors des membres de nos groupes. » « Mais » – dirent les élèves – « c’est saint Pierre qui pose la question. Il faut bien lui répondre ! ». « Et alors » – fit l’homme rusé – « avez vous vu saint Pierre ou le Diable dans votre groupe ? Tout ce que vous avez à faire c’est de ne pas révéler aux personnes hors des groupes ce que vous avez appris de moi. N’avez-vous pas compris que je me suis arrangé du Diable comment faire une âme, mais j’ai aussi arrangé de le tromper en fin de compte en vous enseignant qu’il vous faut SAVOIR ce qu’il faut faire, puis OSER le faire et VOULOIR suivre mes pas et alors SE TAIRE. » Ayant compris, les disciples sont eux-mêmes devenus des hommes rusés et trompaient le Diable. Tout finit bien et dorénavant toutes les âmes gardèrent le silence et entrèrent au Paradis. »
Conte allégorique expliquant « La voie de l’homme rusé »
adapté d’après « Du Tout et de Tout » de G. I. GURDJIEFF
et « The Fourth Way » de P. D. OUSPENSKY.